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Musique 01.07.2017

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Découvertes alphabétiques : D

Dada

Les gouvernements organisent une abominable boucherie : la première guerre mondiale. Quelques artistes refusent cette horreur. Ils constatent parallèlement que les gens qui fréquentent les musées, achètent des toiles, font partie de la soi-disant élite intellectuelle, sont souvent ceux qui organisent et tirent profit de cette guerre d’une façon ou d’une autre. Faillite de la civilisation, constatent ces artistes. Dès lors, l’art étant aux mains des guerriers, faisons de l’anti-art, antiguerre, antibourgeois, antitout ! C’est peut-être nihiliste, mais, au moins, cela a donné une impulsion incroyable à l’art du vingtième siècle. Et non seulement à l’art, et non seulement au vingtième siècle, puisque, encore aujourd’hui, bien des humoristes peuvent se réclamer de Dada, et que même la télévision, pourtant peu souvent créative, voit certaines de ses présentations rafraichies par un agréable vent d’absurde et de dérision. Mais qu’en est-il de la musique ?

Sept manifestes dada 1916–1920, couverture

Collage dada montage typo

Musique ...

Fondateur du mouvement, Tristan Tzara déclare « le plus acceptable des systèmes est celui de n’en avoir par principe aucun ». Or, la musique repose sur des principes, des règles, elle est équilibre de par les lois de l’harmonie et du contrepoint. En même temps que la fondation du mouvement dada, en 1916 au Cabaret Voltaire à Zurich, le monde musical éclate aussi. Que ce soit du côté de Vienne, avec les nouvelles théories de Schönberg, que ce soit du côté de Stravinsky avec les rythmes du Sacre du Printemps. Mais tout cela reste réglé… comme du papier à musique. Le compositeur Erik Satie (1866-1925) côtoie les dadaïstes. Il crée le scandale lorsqu’il introduit, dans l’orchestre du ballet Parade, une machine à écrire, des coups de pistolet, une roue de loterie, des klaxons et une sirène de police et un bouteillophone.

Un extrait de cette musique pleine de poésie et d’inattendu :

https://www.youtube.com/watch?v=cyH6MCM5CxQ&ab_channel=classic-intronet

L’on peut voir Satie au début d’un film totalement Dada, Entracte, de René Clair. Avec sa tenue habituelle, lorgnon et chapeau melon, il saute à côté d’un canon en compagnie de Francis Picabia. La musique est, bien sûr, d’Erik Satie :

https://www.youtube.com/watch?v=mpr8mXcX80Q&ab_channel=TheWelleszCompany

Des jeunes compositeurs côtoyant Satie, Darius Milhaud est le plus engagé dans le mouvement. Il collabore à des revues telles « L’œil cacodylate », mais son intérêt pour l’expérimentation musicale fait qu’il ne reste pas figé dans ce type d’art anar, se mouvant vers des rythmes brésiliens, des influences jazzy et des expériences polytonales.

Schwitters Ursonate

.. ou poésie Dada ?

La vraie musique Dada ne se trouve pas sur les partitions, mais dans les recueils de poèmes. En effet, de par leur graphisme, ceux-ci portent souvent à inciter à des variations vocales lors de leur récitations. Certaines soirées dadaïstes voyaient une grosse caisse frapper si fort que le récitant devait brailler pour lui faire concurrence. D’autre poèmes étaient lus simultanément pour créer une forme de polyphonie. D’autres enfin, très nombreux, ne recourent à aucun mot signifiant, composés que de suites de consonnes et voyelles ne se côtoyant que dans le but de créer un nouveau langage relevant de l’absurde, mais créant des rythmes et des sons nouveaux. L’un de ses poèmes, du grand peintre Kurt Schwitters, prend d’ailleurs un titre musical : Ursonate. J’en ai trouvé une sympathique version chorale :

https://www.youtube.com/watch?v=TfyL3xBP1dY&ab_channel=CarminaSlovenica

Notons que cette œuvre de Schwitters a été écrite dans la même période où l’abbé Bovet écrivait son festival Grevîre ! C’est cela, la magie de la création, tradition d’un côté, expérimentation de l’autre …

Amiral

L'amiral cherche une maison à louer, Huelsenbeck/Jancp/Tzara 1916

Kurt Schwitters Plakatgedicht

T. Dagon